Clément Gaillard, vous venez de publier “Bioclimatique” dans la collection Dérives urbaines. Vu le niveau de tous les auteurs publiés chez Terre Urbaine vous ne dépareillez pas dans l’inventaire si j’en juge par votre cv, Lol

Je ne sais pas, les ventes le diront. C’est vrai que j’ai un parcours pas très académique puisque je suis normalien et agrégé de l’école nationale de Paris-Saclay dans le département de design puis un peu par hasard j’ai fait un Master 2 en philosophie contemporaine et enfin j’ai eu la chance de passer un Doctorat en géographie sur la conception bioclimatique sous la direction de Sabine Barles.

Et pour finir votre cursus vous n’avez pas eu envie de devenir architecte 

C’est vrai que j’y ai pensé après les classes préparatoires aux grandes écoles d’arts appliqués mais je n’étais pas sûr d’aller au bout de la formation, j’ai des modules de CAP en charpente traditionnelle et je suis maçon charpentier bénévole pour l’association Rempart, aujourd’hui cela me permet de questionner les techniques d’architecture en prenant en compte l’environnement et le climat. Le métier d’architecte n’est pas facile parce qu’ils ont beaucoup de réglementations à respecter et ils sont très encadrés, L’urbanisme, c’est un métier très différent, c’est le droit appliqué au sol, il faut donc avoir une solide formation de juriste.

Vous avez créé Freio qui est un bureau d’étude spécialisé dans le design climatique, ça veut dire quoi Freio 

Le o fait penser à l’eau, le F en météorologie est un symbole pour désigner les vents et cela peut être aussi une contraction du nom d’un architecte et ingénieur allemand qui s’appelait Frei Otto qui est reconnu pour l’emploi de structures textiles et pour son langage formel inspiré de la nature. Aujourd’hui je commence à avoir quelques clients institutionnels, j’interviens sur des quartiers pour répertorier et étudier les îlots de chaleur et pour savoir combien d’arbres il faudrait planter par exemple.

Pour vous l’architecture et l’urbanisme ne peuvent pas faire abstraction du climat

Vu les coûts actuels de l’énergie qui ne cessent d’augmenter et le changement climatique qui apparaît de plus en plus violent, la prise en compte du climat pour construire un bâtiment plus résilient paraît de plus en plus évident, on a construit les même boites à chaussures partout sans tenir compte des architectures régionales donc il faut essayer de mieux s’inspirer de l’architecture vernaculaire et traditionnelle sans les singer mais en les faisant évoluer. L’architecture vernaculaire traditionnelle avait sa place dans un mode de vie paysan, les gens vivaient dans les cuisines pour se chauffer avec deux bûches de bois par jour, il ne s’agit pas d’être nostalgique mais d’ouvrir un imaginaire pour l’architecture moderne.

Quel est le point de rupture de l’architecture moderne

Je pense que Le Corbusier a sa part de responsabilité un jour il a dit que tout le passé devait être rejeté et qu’on devait recommencer à zéro et depuis on l’idolâtre en oubliant qu’il s’était un peu trop rapproché du fascisme. Je ne jette pas le bébé avec l’eau du bain parce qu’il a fait de belles choses notamment en s’inspirant de l’architecture du maghreb.

Est-ce que l’on peut adapter un immeuble au bioclimatisme comme on le fait avec une maison

En hiver l’habitat collectif est un bon moyen d’économiser du chauffage parce que chaque appartement profite de la chaleur accumulée, en revanche en été si l’immeuble est trop orienté à l’ouest la chaleur va s’accumuler et il sera invivable, il ne faut pas oublier que quelque soit le temps le corps humain produit l’équivalent de 100 watts, en hiver c’est pratique mais en été ça s’additionne au soleil.