Vous êtes photographe, mais vous êtes surtout musicien et batteur en plus
Musicien c’est mon métier principal depuis presque 20 ans, j’ai fait l’American School of Modern Music à Paris et l’école de Batterie Agostini, j’ai fait beaucoup de jazz à l’école mais aujourd’hui je suis plutôt dans l’univers de la Soul Music avec  Ben l’Oncle Soul. La photo m’a pris quand j’étais ado en vacances aux Etats-Unis avec un petit appareil jetable, un peu plus tard pour éduquer mon oeil j’ai suivi pendant quatre ans les enseignements de la photographe suédoise Regina Virserius aux ateliers des Beaux-Arts de la mairie de Paris, cela m’a permis de m’échapper un peu du microcosme de la musique et d’amplifier mes connaissances culturelles.
Mais la photo c’est resté un hobby ou c’est aussi une activité professionnelle
J’ai le statut d’artiste auteur, je vends des tirages d’art. De part mes contacts dans le monde de la musique je shoote des portraits de musiciens, je fais des pochettes de disque. Il y a quelques années j’ai eu la chance d’être contacté par Olivier Goy qui est surtout connu médiatiquement par son combat contre la maladie de Charcot avec son film Invincible été, et j’ai rejoint sa fondation Photo4food qui permet de financer des repas destinés aux plus démunis en vendant des tirages de photos.
Mise à part vos portraits de musiciens qui est pour moi un travail en aparté, globalement dans vos photos les humains sont aux abonnés absents et même dans votre série l’homme qui marche ils sont traités comme des objets plastiques
Avec mon métier de musicien je fais beaucoup de tournées en France et à l’étranger, la photo me permet de m’échapper des hôtels et des aéroports et aussi des salles de concerts, j’ai besoin de me retrouver seul, la photo est propice à la méditation et en même temps comme pour la musique il faut être à l’écoute à ce qu’il se passe autour de soi. J’ai commencé cette série en hommage à Giacometti et je l’agrémente au fil de mes déplacements de musiciens.
On dirait des images pour des pubs de la marque Ricoh, mdr
J’ai gagné un Ricoh gr2 lors d’un concours organisé par la marque, Lol
Vous avez presque une démarche d’urbaniste avec votre travail sur la Butte-Rouge et de graphiste avec votre série la beauté de la bête
Je rajouterai de graphiste frustré pour ma série la beauté de la bête dont le point de départ était un article de Télérama qui titrait la France moche et qui parlait d’endroits périurbain.
La cité-jardin de la Butte-Rouge qui se situe à côté de chez moi à Châtenay-Malabry est un site incroyable et qui est fragilisé par la pression immobilière donc j’y retourne très souvent, parfois même tous les jours pour l’immortaliser et pour témoigner. Par ce travail je tente de mettre en exergue la poésie d’un lieu de vie où la violence d’une mutation peut également se faire ressentir, représentation d’une ville dans la ville emblématique en danger.
Précisément c’est quoi l’histoire de la Butte-Rouge
C’est un modèle historique d’urbanisme social et humaniste du XXème siècle, l’ensemble d’habitations de la cité jardin « la Butte-Rouge » de Chatenay-Malabry a été conçu sous l’impulsion d’Henri Sellier, administrateur-délégué de l’Office des Habitations à Bon Marché, puis membre du gouvernement du Front Populaire, par les architectes Joseph Bassompierre, Paul de Rutté et André Arfvidson, remplacé par Paul Sirvin et le paysagiste André Riousse au gré de 7 tranches de construction entre 1929 et 1965. Ce projet s’inscrit directement dans la lignée des réflexions sur la notion de paysage, représentatif du rapport de l’homme à son environnement. A travers une expérience sensible il s’agit d’y célébrer les mythes et les lieux emblématiques d’une identité territoriale. Les créateurs de la cité jardin de la Butte-Rouge, ont su démontrer qu’il était possible de créer une ville avant-gardiste, exemplaire en terme d’installation topographique, capable de traverser le temps et de tracer les contours mouvants de la vie moderne.
Olivier Goy est une personne hors du commun, non seulement c’est un grand businessman mais en plus  il a su transformer le désarroi de la terrible maladie qui le frappe en un formidable élan de solidarité autour de la maladie de Charcot pour lever des fonds très importants au profit de la recherche sur le cerveau
Oui effectivement, c’est une personne solaire avec une énergie incroyable, la photo est aussi une de ses grandes passions dans laquelle il excelle.
Et au travers de cette association vous avez obtenu une résidence d’artiste à Deauville dans laquelle vous exprimez une vision urbaine assez abstraite que vous intitulez la morsure
J’en profite pour remercier à nouveau Olivier et Virginie Goy ainsi que les membres du jury pour cette incroyable opportunité et pour être tout à fait honnête ce n’était pas mon premier projet pour cette résidence d’artiste qui était initialement plus centré sur l’architecture d’Auguste Perret dans la ville du Havre, mais je ne m’y suis pas retrouvé et en fait je suis tombé sur cet espace en arrivant en voiture par l’estuaire de la Seine et là j’ai eu cette réflexion de savoir si nous sommes à la genèse d’un monde nouveau, lieu originel où les éléments terre, eau, air, feu en se mélangeant dans un grand maelström seraient parvenues à l’osmose, ou bien en présence d’un univers où les vestiges de la morsure anthropique laisserait place à une nouvelle ère. Il ne s’agit pas d’établir ici une représentation du monde réel mais plutôt de développer par l’effervescence du territoire de l’estuaire de la Seine un nouveau paysage mental.
On parlait précédemment de la marque Ricoh, niveau matos vous bossez avec quoi
Cela dépend des projets, pour la morsure j’ai shooté en numérique avec un Canon 6D et avec des flashs cobra équipés de différentes gélatines de couleur pour la Butte-Rouge j’utilise un Yashica Mat 124 G format 120 avec de la Portra 400 pour ses couleurs assez douces.